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Le royaume avant l’Église.

 

Royaume

 

Selon les évangiles, Jésus avait promis à ses disciples qu’ils partageraient avec lui le royaume de Dieu. Ce royaume fut appréhendé et désigné comme, tantôt le royaume d’Israël, tantôt comme le royaume des cieux. Juste après sa mort l’attitude des disciples de Jésus, leurs espoirs et leur désespoir, varie aussi d’un récit à l’autre. Pour ce qui se passe après la crucifixion effectivement l’on rencontre un accord dans les évangiles à savoir le désarroi des disciples, leur défaitisme, et le fait que l’annonce de la résurrection figure une nouvelle au quelle il ne s’y attendaient pas, et les prend à revers si je puis dire. Cela les fait revenir et retourner à Jérusalem, on lit cette image dans l’histoire des pèlerins d’Emmaüs qui tourne le dos à Jérusalem. On a là un récit extrêmement fort, une métaphore de ce qui c’est réalisé après le mort de Jésus où le constat d’échec est posé sur l’espoir messianique dans la mesure où la mort c’est déroulé sans signe majeur et sans produire de changement politique. Or les disciples avaient espéré jusqu’au dernier moment un retournement prodigieux des événements ou alors d’un rebond. Jésus leur a annoncé l’arrivée du royaume de Dieu, que celui-ci résidait parmi eux, et Jésus a terminé crucifié par les Romains, avec peut-être l’aval des autorités juives de son temps. Le royaume de Dieu ne s’est pas matérialisé. Ainsi pour tous ceux qui ne bénéficiaire pas d’une apparition de Jésus, ceux-ci n’avaient aucune raison de penser que quelque chose de particulièrement de radical et de nouveau était survenu. Et donc je pense que pour un très grand pourcentage des Juifs qui ne croyaient pas en Jésus, ou qui doutaient un peut, Jésus était un prophète qui s’était trompé à savoir un faux prophète. En, gros je déclarerais que tous ceux qui croyait en Jésus et attendaient le royaume de Dieu, d’une façon matérialiste furent fortement déçus. Mais Jésus l’homme historique quand il annonçait le royaume du Père, lui personnellement dans sa raison dans ses pensées, voyait-il lui aussi la venue du royaume de Dieu d’une manière physique, c’est-à-dire d’une approche matérialiste sur Terre ? Je dirais un royaume terrestre visible par tous. C’est là une grande question.

Alors que se passe-t-il ?

Naturellement, le problème se pose à la mort de Jésus ! quel sens donné à cette mort ? Cela signifiait-il que Dieu déclenche une crise que son royaume va s’accomplir tout de suite ? Est-ce que la réalisation du royaume de Dieu est renvoyée à l’avenir ? Ou n’avons nous tout simplement rien compris au message de Jésus ? Si, ses propres disciples ne saisirent pas grand-chose à son message, ainsi qu’à son enseignement, on demeure en droit de penser que la transmission ne peut apparaître que d’une façon imparfait. Nous devons alors replonger dans ce que Jésus a dit a fait sans trop écouter ce que les disciples nous dissent ce qu’eux ont compris. Comme c’est eux qui ont transmis l’enseignement, cela figure dès lors qu’une tâche ardue nous attend, et entreprendre de lire entre les lignes.

Il est possible en lisant les évangiles et certainement pour ceux qui les ont écrits de penser que Jésus a éprouvé une espérance à court terme. C’est-à-dire qu’il avait espoir que son message et sa proclamation recevraient un accueil favorable. Autrement dit qu’il espérait peut-être que le peuple adhérerait massivement à cette annonce et qu’à partir de là le royaume viendrait en quelque sorte s’instaurer quasi naturellement. Que Dieu viendrait parfaire le processus, mais d’une manière relativement éminente. Un texte comme celui des douze trônes trouve quand même une explication la plus probable en fonction d’un horizon qui reste à l’horizon terrestre. À savoir qu’il y aurait une conclusion terrestre à la proclamation de l’éruption du royaume et que celui-ci trouverait son plein achèvement ici-bas. Dans ces conditions Jésus se serait-il mépris ?

Dans l’évangile selon Matthieu, les paroles de Jésus se présentent comme cela :

« en vérité, je vous dis que vous qui m’avez suivi lors de la nouvelle création quand le fils de l’homme sera assis sur le trône de sa gloire eh bien vous vous siégerez aussi sur douze trônes jugeant les douze tribus d’Israël. »

Ici figurons-nous dans le matérialisme ou le spirituel ?

Ce texte est intéressant parce que si on envisage que cette parole puise remonter au Jésus historique alors derrière le verbe qui est employé en grec pour parler du jugement des douze tribus d’Israël se rencontre un verbe en araméen qui trouve sa racine non seulement dans le fait de juger, mais non moins de réagir. Ce qui peut dès lors envisager non seulement le jugement, mais aussi une forme de gouvernement ou en tout cas une forme d’exercice de pouvoir sur les douze tributs. À ce moment-là, on peut proposer une double lecture et parmi les lectures possibles une promesse valant pour les disciples, en leur indiquant qu’ils seraient donc associés à un gouvernement du peuple d’Israël dans son ensemble.

Du temps de Jésus terrestre d’après notamment Matthieu, au chapitre 19 Pierre lui dit : « nous avons tout abandonné qu’est ce que nous allons faire ? » Jésus lui répond : « vous allez siéger sur les douze trônes pour juger les douze tributs d’Israël ». C’est une manière de dire que les douze doivent véritablement renouveler Israël. Au début des Actes, on va reconstituer le groupe des douze parce qu’un d’entre eux a manqué à la mission, celui que l’on appelle Judas que l’on désigne en général comme l’un des douze. Si Jésus a rassemblé autour de lui douze disciples et je le crois fondamentalement, c’était déjà pour exprimer quelque chose vis-à-vis d’Israël et la prétention justement de rassembler autour de ces douze l’Israël renouvelé de façon eschatologique. Donc l’on peut penser que Jésus désire constituer autour de la proclamation du royaume pour rénover Israël des gestes et des actes symboliques. Le fait que les douze renvoient aux douze tribus d’Israël avait de ce point de vue là un sens symbolique. Mais nous ne devons pas regarder Jésus comme instituant les douze de manière solennelle convoquant tout le peuple. Je dirais que l’on rencontre un fait qui peu à peu s’est constitué c’est-à-dire que Jésus a constaté, et a donné un sens au fait que peu de disciples se retrouvèrent proches de lui. Ce groupe de fidèles il l’a interprété comme groupe des douze.

Trois listes de disciples figurent dans les évangiles de Matthieu de Marc et de Luc, mais celles-ci ne concordent jamais exactement ente elle, car elles attribuent des places et des noms différents aux douze disciples. Ce groupe à mon avis n’apparut pas composé que des douze qui est un cercle restreint et que nous appelons le cercle des intimes. Mais Jésus se trouve entouré d’un cercle d’adhérents beaucoup plus large parmi lesquels on peut découvrir Joseph d’Arimathie, Zachée, des femmes signalées par l’évangéliste Luc, Marie de Maggdala et tant d’autres. Donc un groupe je dirais rapproché et un cercle plus large d’adhérents. D’abord, on n’est pas contraint de penser que les douze étaient douze. Parce que douze figure un chiffre symbolique, et ce que l’on constate, c’est que les répertoires des douze dans le Nouveau Testament comprennent un certain nombre de figures obligatoires. L’on n’imagine pas une liste des douze sans Pierre, sans Jean, sans André sans Matthieu ; mais lorsque l’on arrive à la fin de la liste, on observe des variations assez importantes. Alors on a l’impression que nous demeurons en présence d’un quatuor de tête que le premier de ce quatuor de tête demeurait Pierre, ensuite quand l’on va un peu plus loin on aperçoit que les frontières des douze son flexible. Donc on imaginera que Jésus demeurait accompagné d’un certain nombre de compagnons.

On revêt des petits détails et je parle au sein des douze indépendamment de Paul. Par exemple la fameuse interrogation de « qui est le plus grand » (Marc 9, 30-37) c’est une bonne question qui revient deux fois ou encore à un moment donné Pierre et les autres disent à Jésus (Marc 9 v 38) : « Maître, nous avons vu un homme qui chasse des démons en ton nom ; et nous l’en avons empêché, parce qu’il ne nous suit pas. » On voit ainsi des petits détails qui font penser à une mentalité un peu sectaire ou étroite, et qui disent « c’est nous le vrai groupe et pas les autres ».

Le groupe des douze anticipe le royaume à venir un royaume que certains comprennent comme un royaume céleste vers lequel ils monteront à l’appel du ressuscité. Un royaume que d’autres au contraire n’imaginent pas ailleurs que sur Terre et sur la terre d’Israël enfin purifier de la présence romaine.

En acte 1, v 6 et les suivants et donc tout au début des Actes des apôtres, alors que Jésus ressuscité demeure en compagnie de ses disciples pendant 40 jours continuant d’ailleurs à leur parler selon l’auteur à Théophile de ce qui concerne le royaume de Dieu, voilà les disciples qui l’interrogent, et lui demande « Seigneur, est-ce en ce temps-ci que tu rétabliras le royaume d’Israël ? »

Qu’attendent-ils ?

Ils attendent que Dieu par un envoyé libère Israël du poids des païens. L’occupation romaine apparut vraiment comme un acte humiliant pour les Juifs qui sont selon sa foi les témoins de la sainteté de Dieu au milieu d’un monde païen ; or cela le judaïsme ne peut même plus le réaliser à cause de l’occupation romaine. Les païens vivent là en plein territoire juif et jusqu’à la porte du temple. Nous ne devons pas oublier qu’au temps de Jésus nombreux d’entre eux habitaient en terre sainte et qu’il existait des villes composées largement de Grecs, de non-juifs où se rencontrait des temples païens. Par conséquent pour les juifs les plus traditionalistes la situation apparaissait inacceptable. La voie se trouve tracée dans le judaïsme palestinien des années 30 ; les gens baignent dans l’espoir d’une restauration d’Israël dès lors dans un désir dont on connaît les multiples variantes. Mais qui en gros trouve sa cohérence dans l’attente d’une restauration de la pureté d’Israël et cela est à la fois le terrassement du mal et ses vecteurs qui sont les impies qui foulent le pays. Mais c’est aussi l’espérance de la conversion des pécheurs des gens de mauvaise vie à l’intérieur du peuple. C’est l’attente d’une restauration théocratique. C’est ce que les zélotes vont prendre en charge. Pour comprendre l’enseignement de Jésus et surtout comment il se trouva perçu à ce moment-là, nous devons donc nous replacer dans ce contexte de la Judée à cette époque. La Judée apparaissait administrée par le gouverneur romain qui se découvrait quand même assez féroce. Ainsi de plus en plus de courants de type zélotes, qui pillaient et rançonnaient et qui était qualifié de brigands étant donné qu’ils captaient ce qui devait être des impôts soit pour le temple soit pour les Romains. Ces zélotes étaient fiscalement brigands ou voleurs, et on les appelait sicaires parce qu’ils possédaient un poignard un peu court. Donc des mouvements de rébellion contre tout le monde, mais religieuse pour ces zélotes.

Donc je crois qu’il est effectivement possible que les juifs du premier siècle de notre ère en entendant parler du royaume de Dieu se soient imaginé que le règne de Dieu paraissait inévitablement comme l’instauration d’une autre économie sur la terre d’Israël. Mais le règne de Dieu c’est une théocratie exprimée en terme politique, et qui ne figure plus une construction artificielle en Israël, avec l’occupation romaine. Le fait que les rois les grands prêtres et n’importe qui collaborent avec l’ennemi conduit et démontre que depuis longtemps Israël n’existe plus en tant qu’une théocratie. Donc l’attente demeure le rétablissement d’une véritable théocratie en Palestine. Là-dedans pour le juif pieux, évidemment au sein de cette théocratie ils pourront certainement avoir des responsabilités, des places, faire valoir des programmes d’organisations. Là-dessus et tous ces espoirs les évangiles sont très silencieux, on parle simplement effectivement du règne de Dieu.

J’ai l’impression et je suis convaincu que toutes les sources que nous avons ne nous permettent pas vraiment de donner une épaisseur politique à l’action de Jésus. Mais nous demeurons en présence de sources qui figurent toutes postérieures à sa mort. Conséquemment et inévitablement, ce sont des sources qui réécrivent l’histoire à la lumière de ce qui s’est passé ensuite, et du point de vue politique cela est apparu comme un échec. Donc par la suite, mieux valait effacer de l’histoire ce positionnement. Mais malgré cela, selon moi, la tradition sur Jésus ne permet pas de recevoir l’hypothèse que la libération politique et militaire de la Palestine se trouvait pour Jésus un problème de première importance. Il ne l’a peut-être jamais cru. Je considère que le texte de ses enseignements reste très clair, mais à quoi espéraient les disciples de Jésus ? Qu’ont-ils compris du royaume de Dieu dont leur parlait leur maître ? Ils s’attendaient à quoi ? La restauration du royaume d’Israël sur Terre, comme presque la totalité des Juifs qui souhaitaient la restauration du royaume et qui même sont partis en guerre contre les Romains. Des pièces de monnaie qui remonte à l’an 60 portent des slogans pour la libération d’Israël. C’est ce que l’on trouve à la fin de l’évangile de Luc. Des disciples sont en route pour Emmaüs, Jésus ressuscité vient à leur rencontre et leur demande : « De quoi discutez-vous en marchant ? » Alors, ils s’arrêtèrent, tout tristes. L’un des deux, nommé Cléophas, lui répondit : « Tu es bien le seul étranger résidant à Jérusalem qui ignore les événements de ces jours-ci. » Il leur dit : « Quels événements ? » Ils lui répondirent : « Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth, cet homme qui était un prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple : comment les grands prêtres et nos chefs l’ont livré, ils l’ont fait condamner à mort et ils l’ont crucifié. Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël. »

Délivrer Israël veut dire se libérer du joug romain. Or Jésus a défendu un idéal et un programme de réformes d’Israël ; mais le fait de se situer à l’intérieur d’Israël ne légitime pas n’importe quel propos et notamment et aucunement un discourt de genre nationaliste. Deuxièmement, nous n’avons pas trace dans la prédication que fit Jésus du type de l’annonce d’un royaume, aux traits spécifiques du nationalisme juif.

Jésus sait que l’armée d’occupation commet des exactions et probablement que pour Jésus l’occupation romaine n’est pas une bonne chose. L’on rencontre la fameuse histoire de l’armée des esprits démoniaques. Ces démons qui se nomment légion sont chassés et transformés en porcs. Si celle-ci remonte à Jésus historique, les implications politiques de cette histoire me semblent très claires. Jésus pensait que Dieu était d’une certaine manière en train d’intervenir en chassant ces démons qui matérialisaient l’occupation militaire. Mais apparemment pour Jésus cela n’impose pas d’organiser une révolte politique et militaire. Il annonce : « si c’est par le doigt de Dieu que j’expulse les démons, alors le royaume de Dieu a fait irruption jusqu’à vous ». Donc il lit l’irruption du royaume de Dieu à des actes qu’il pose, mais des actes sociaux et qui n’ont rien de politique a priori. En gros, Jésus veut enseigne à ses disciples, faite le bien autour de vous, soyez juste, aimez Dieu et votre prochain, donnez aux pauvres et partagé vos biens, alors le royaume de Dieu s’approchera de vous. Autrement dit, vous vivrez le royaume que veut Dieu c’est-à-dire la façon que les hommes doivent vivre sur Terre. J’imagine que pour Jésus nous devons effectuer une distinction entre deux catégories et c’est fort important ; d’une part, on pourrait analyser son intervention en termes d’activisme et d’activisme politique. Mais un activiste possède en général des partisans et l’on peut l’analyser en termes de prophétie, car Jésus se présente comme un prophète et pas n’importe quel prophète ; mais un prophète qui exprime justement ce qui pouvait paraître incroyable à savoir que le royaume de Dieu a fait irruption, mais nous devons avoir un cœur disposé à le voir, mais surtout le vivre. Un tel prophète présente en général des disciples et c’est plutôt ainsi qu’il convient d’interpréter la venue de Jésus. Mais si ses disciples n’ont pas compris ainsi son enseignement spirituel ; s’ils l’ont compris d’une façon exclusivement matérielle ; et les évangiles nous montrent assez que de ce côté-là, ils n’étaient pas des aigles. Dès lors après sa mort et même sa résurrection ils attendent toujours la venue du royaume. Je crois que le grand drame demeure là. C’est l’attente de la venue du royaume alors que spirituellement c’est au disciple d’atteindre comme son maître le royaume par ses actes en suivant ses pas.

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