Héritage et querelle de famille

He ritage et querelle de famille

Pour connaître les débuts du mouvement primitif, le livre des Actes des apôtres figure quasiment la seule documentation. Or ce texte écrit un demi-siècle après les événements qu’il évoque exige une lecture extrêmement minutieuse.

Actes des apôtres ch 1 verset 15 « En ces jours-là » le terme nous laisse dans l’ignorance absolue de toute référence chronologique précise donc c’est une suture rédactionnelle. On en rencontre comme cela de nombreuses dans les textes de cette époque. « Le nombre des disciples augmentaient » cela c’est un leitmotiv des premiers chapitres des Actes des apôtres et c’est aussi rédactionnels. L’auteur des Actes des apôtres que l’on dit être Luc (ne discutons pas ici de la véracité et la personnalité de l’auteur) veut montrer que ceux qui se rattachent à Jésus de Nazareth sont de plus en plus nombreux. Alors les Actes nous donnent des chiffres 3000, 4000 et ainsi de suite et l’on en reste là. Au même degré que tous les totaux de l’Antiquité, ce sont des nombres aussi réels que lorsque l’on prétend que quelqu’un qui reçoit un choc sur la tête voit trente-six chandelles ; c’est exactement de ce type-là. Donc le nombre des adeptes ce que j’appellerai les fans de Jésus, car on les dénomme de façon très différente au début augmente. On les désigne tantôt, comme les saints, tantôt comme les partisans de la voie, tantôt ce sont les fidèles, tantôt ce sont les disciples. Je pense que nous rencontrons autant de dénominations qu’il existe de groupes ou d’église. Ici, ce sont les disciples. On ne retrouve donc aucune uniformité dans le vocabulaire. Seulement, quelque chose qui demeure tout à fait intéressant apparaît. Cela nous donne malgré cette volonté d’une présentation harmonisant de l’ambiance des premiers moments du mouvement des disciples de Jésus. Où l’on a l’impression que tout le monde est beau et que tout le monde est gentil ; que ces personnes semblent unanimes, c’est-à-dire que l’on rencontre qu’une âme, bref en bon français « ça baigne ».

Et bien, ça baigne peut-être beaucoup moins qu’il n’y apparaît. Là, on se rend compte que l’on éprouve une grosse difficulté.

(Actes ch6 v1) : « En ce temps-là, le nombre des disciples augmentant, les Hellénistes murmurèrent contre les Hébreux, parce que leurs veuves étaient négligées dans la distribution qui se faisait chaque jour. »

Alors qu’est-ce que ces hellénistes et ces Hébreux ?

C’est deux termes importants, mais ce sont des mots disons un peu confidentiel quand même, les Hébreux cela désigne le groupe des apôtres, et la famille de Jésus. L’idée que ce sont des Hébreux en ce sens que ce sont des individus qui ont comme langue principale l’araméen et l’hébreu va se retrouver chez Paul dans le fait qu’il donne au chef des Hébreux Pierre son nom araméen Céphas. Les hellénistes ce sont d’autres personnes curieusement je ne pense pas que les hellénistes soient uniquement des gens parlant Grecque, mais ils restent influencés par la culture grecque. J’imagine qu’ils figurent le christianisme qui va prospérer en Égypte, mais par la suite aussi celui qui va se développer dans la diaspora araméenne ; où l’on présente un christianisme qui va jusqu’aux Indes et qui est assez apparenté au christianisme, disons des hellénistes d’Égypte.

Il apparaît très important de voir que Jérusalem était à cette époque une cité judéo hellénistique. Dans les ossuaires 40 % des inscriptions sur les 280 recensés à Jérusalem sont écrites en Grecque. De nombreux exemples attestent que le grec se trouvait la langue maternelle de 15 à 20 % de la population, beaucoup de femmes notamment ne parlaient pas l’araméen. Nous étions en présence de différent groupe à Jérusalem qui aimait pour pratiquer leur culte se retrouver avec des Juifs qui parlaient la même langue qu’eux. Donc les Juifs dont la langue maternelle demeurait l’araméen qui possède des racines communes avec l’hébreu, ce sont eux les Hébreux dans le livre des Actes. Ils se regroupaient et pratiquaient dans leur propre langue. Mais à cette époque à Jérusalem l’on rencontrait beaucoup de Juifs qui parlaient grec. Eux aussi pratiquaient à domicile se réunissaient à 20 ou 30 fidèles de Jésus et parlaient le grec. Peut-être que des tensions entre ces deux groupes existaient. Cette division linguistique à créer deux cultes différents puisque beaucoup d’hellénistes ne parlait pas l’araméen. Une grande partie venait de la diaspora, et ils souhaitaient s’installer à Jérusalem dans la ville sainte pour vivre près du temple le lieu sacré où le Messie devait revenir. Comme ils ne pouvaient pas suivre le culte en araméen il fallait le célébrer dans leur langue ce qui entraîna la création de deux communautés religieuses distinctes.

Nous étions donc en présence à Jérusalem au sein de la communauté juive chrétienne de deux communautés. Mais le clivage culturel laisse dans l’ombre d’autres oppositions entre les Hébreux et les hellénistes, représenté par Étienne.

Actes ch 6, 1-4 « En ce temps-là, le nombre des disciples augmentant, les Hellénistes murmurèrent contre les Hébreux, parce que leurs veuves étaient négligées dans la distribution qui se faisait chaque jour. Les douze convoquèrent la multitude des disciples, et dirent : il n’est pas convenable que nous laissions la parole de Dieu pour servir aux tables. C’est pourquoi, frères, choisissez parmi vous sept hommes, de qui l’on rende un bon témoignage, qui soient pleins d’Esprits saints et de sagesse, et que nous chargerons de cet emploi. Et nous, nous continuerons à nous appliquer à la prière et au ministère de la parole. »

Et finalement, Étienne est choisi ainsi qu’un prosélyte c’est-à-dire un gentil (un non-juif) converti au judaïsme qui s’appelait Nicolas. Qu’est-ce que cela signifie ? Ceci est une question très difficile, car histoire et apologie peuvent être à ce point confondues qu’il me semble dès lors impossible de les démêler. Le choix des faits demeure en lui-même un problème. Il se trouve d’ailleurs surprenant que Luc l’auteur des Actes présente le récit d’un conflit dans la communauté primitive à propos des veuves. Le récit prend une drôle de tournure et le procédé n’a apparemment pas bien fonctionné, nous le verrons plus loin. On constate à travers ce récit que la communauté primitive n’apparaît pas aussi harmonieuse que Luc veut le présenter. Dans la plus pure tradition de l’Ancien Testament, il en donne d’abord cette description idéale ils sont un corps et une âme et l’on ne compte pas de pauvres parmi eux. Mais on rencontre une sorte d’affrontement entre eux. Des murmures des mécontentements chez les hellénistes contre les Hébreux. L’affaire a été réglée par la constitution d’un groupe d’entre aides qui sera chargé de distribuer ce dont les hellénistes ont besoin. L’auteur des Actes des apôtres tâche de faire acter et de hiérarchiser deux courants qui existent parallèlement. Il les hiérarchise dans l’autorité et dans la géographie, c’est-à-dire qu’il projette effectivement des rapports de subordination à Jérusalem et même une tension entre deux mouvements. Ceux-ci auront une importance assez considérable pendant les premières années du christianisme. Ce qu’on appelait les communautés de Judée visiblement des gens restés fidèles au judaïsme et fidèle à la loi, et d’autre part des juifs libéraux hellénistes, qui connaissent la philosophie grecque, et imprégnée de celle-ci ! Donc des gens à vocation beaucoup plus universaliste et beaucoup plus internationaliste que le judaïsme des communautés de Jérusalem. Alors Luc essaye de subordonner les deux collectivités l’une à l’autre et par conséquent de présenter une mouvance unitaire constituée de deux réseaux qui en fait se trouvent plutôt centrifuges que centripètes. On rencontrait dès lors à Jérusalem deux communautés chrétiennes distinctes, les chapitres 6 à 8 des Actes ont bien tendance à dire que deux mouvements existaient à l’intérieur de l’Église. Je pense que nous nous trouvions en présence de deux communautés différentes. Les sept hommes qui furent choisis, dont Étienne et Nicolas, étaient des leaders de la communauté des hellénistes ; et les douze étaient des leaders de la communauté juive dirigée par Pierre, mais l’on rencontrait aussi la famille de Jésus. Peur-être que ces deux communautés collaboraient et se réunissaient de temps en temps, mais on n’en sait rien.

Luc est un très bon narrateur et il est passé maître dans la façon de saisir une anecdote et de la livrer à ses lecteurs comme une anecdote insignifiante. Donc on est en droit de se poser la question suivante : la crise qui a marqué la communauté de Jérusalem des origines, s’est-elle déroulée telle que Luc le raconte au chapitre 6 ? Crise qui d’après Luc intervient sur la question de la distribution des secours matériels aux veuves. Selon Luc, les hellénistes estimaient que les leurs apparaissaient moins secourues par rapport à celles des Hébreux. C’est-à-dire des juifs « chrétiens » qui s’exprimaient en hébreu, alors qu’eux figuraient être des juifs « chrétiens » parlant le grec. Par conséquent est-ce que c’est sur ce détail qu’a éclaté la crise ? On a forte raison d’en douter ! Les raisons ont dû apparaître certainement plus profondes, on peut imaginer que cette dispute cette tension a été une bataille féroce la suite nous le montre. Pour que Luc le signale, la chose devait sûrement posséder une forte réalité historique que Luc ne pouvait pas tenir sous silence. Mais il réalise tout ce qu’il peut quand même afin que par delà la tension il obtienne une harmonie. Parfois, je pense que les Actes des apôtres figurent semblables à un tableau impressionnant au même degré qu’une œuvre comme celles que l’on admire au musée d’Orsay. Alors qu’on se trouve à une certaine distance, c’est absolument magnifique, mais quand on s’approche il y a un coup de pinceau ici et un autre coup là et encore là, et cela paraît moins fascinant ? C’est pareil avec le livre des Actes, quand on lit entre les lignes et que l’on veut reconstruire la réalité cachée c’est très difficile. Mais de loin, c’est une peinture magnifique de l’église de Jérusalem qui vivait dans l’harmonie sans dispute. C’est sûr que cela n’était pas le cas. Luc effectue dans ce chapitre 6 un exercice extrêmement intéressant d’acrobatie en effet le point de départ c’est cette répartition des tâches. Les apôtres n’ont pas le temps de s’occuper des veuves des hellénistes. C’est pourquoi on nomme sept diacres qui seront chargés de ce que l’on appellerait aujourd’hui la diaconie, c’est-à-dire le service de table, le service social de l’Église. Or la première personne qui surgit dans le cercle des sept c’est Étienne et dès lors celui-ci apparaît comme une figure de prédication qui obtient un succès visible et qui va être le premier martyr chrétien. Mais il ne va pas apparaître martyr à titre de diacre, mais en tant que prédicateur de l’Évangile.

Originaire des synagogues de la diaspora, Étienne apparaît comme un propagandiste chrétien qui défend ses convictions contre les membres de la communauté de Jérusalem. Évidemment ses discours suscitant des résistances, il se trouve calomnié et accusé d’être un provocateur.

Actes ch 6 v9 — 14

« Quelques membres de la synagogue dite des Affranchis, de celle des Cyrénéens et de celle des Alexandrins, avec des Juifs de Cilicie et d’Asie, se mirent à discuter avec lui ; mais ils ne pouvaient résister à sa sagesse et à l’Esprit par lequel il parlait. Alors ils subornèrent des hommes qui dirent : nous l’avons entendu proférer des paroles blasphématoires contre Moïse et contre Dieu. Ils émurent le peuple, les anciens et les scribes, et, se jetant sur lui, ils le saisirent, et l’emmenèrent au sanhédrin. Ils produisirent de faux témoins, qui dirent : Cet homme ne cesse de proférer des paroles contre le lieu saint et contre la loi ; car nous l’avons entendu dire que Jésus, ce Nazaréen, détruira ce lieu, et changera les coutumes que Moïse nous a données. »

C’est un écho de l’accusation portée contre Jésus dans l’évangile de Marc que nous raconte ici Luc. Apparemment, Étienne avait aussi critiqué le culte du temple. Ceci figure rapporté dans un ajout ultérieur particulièrement archaïque et un peu particulier. Je veux dire que Luc qui d’ordinaire rédige lui-même ses discours dans les Actes des apôtres ici c’est basé sur d’autres éléments et à la fin on trouve également cette critique envers le temple.

(Ch 7 v 48 - 55)

 « Mais Dieu n’habite pas dans ce qui est fait de mains d’homme, comme dit le prophète : Le Ciel est mon trône, et la Terre mon marchepied. Quelle maison me bâtirez-vous, dit le Seigneur, ou quel sera le lieu de mon repos ? N’est-ce pas ma main qui a fait toutes ces choses ?... Hommes au cou raide, incirconcis de cœur et d’oreilles ! vous vous opposez toujours au Saint-Esprit. Ce que vos pères ont été, vous l’êtes aussi. Lequel des prophètes vos pères n’ont-ils pas persécuté ? Ils ont tué ceux qui annonçaient d’avance la venue du Juste, que vous avez livré maintenant, et dont vous avez été les meurtriers, vous qui avez reçu la loi d’après des commandements d’anges, et qui ne l’avez point gardée !... En entendant ces paroles, ils étaient furieux dans leur cœur, et ils grinçaient des dents contre lui. Mais Étienne, rempli du Saint-Esprit, et fixant les regards vers le Ciel, vit la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite de Dieu. »

   Luc signal par le discours qu’il prêt à Étienne au chapitre 7 qu’effectivement des reproches demeurent faits à l’égard de ce chef de file du groupe helléniste. Cela touche à la foi le rapport à la Torah donc le rapport à la loi, Luc ne va pas le camoufler, mais au fond il ne va pas déployer les éléments du conflit.

Maintenant, nous devons lire entre les lignes, pour identifier les tensions qui existaient. En tant qu’historien on peut supposer que ces tensions venaient de débats suscités par l’application de la loi de Moïse, l’essence même de la religion juive. Certains avaient une vision plus libérale d’autres étaient plus prudents dans leurs interprétations de la loi.

La division théologique entre les hellénistes et les Hébreux trace une faille dans la préhistoire du mouvement chrétien à travers le martyr d’Étienne qui selon les Actes des apôtres serait mort lapidé. Le groupe des hellénistes cherche à s’accaparer la figure emblématique de Jésus. Que l’on présente Étienne comme une duplication de Jésus parce qu’il discute sur le temple on le peut puisque Jésus fut lui-même condamné pour avoir discuté sur le temple. Mais sur la loi, cela me paraît plus délicat parce que Jésus n’est pas tellement présenté comme quelqu’un qui a discuté sur la loi. En conséquence, il ne figure pas impossible que cet Étienne apparût progressiste et peut-être qu’il eut mieux compris lui les vues rénovatrices de Jésus ; et notamment sur la venue du royaume tout personnel de Dieu dans les œuvres sociales, ce qui semble demeurer à la source du conflit. Alors ses anciens coreligionnaires juifs de langue grecque, mais restée Juifs le mirent à mal. On développa une sorte de cabale contre lui ; et on le chargea ce qui s’est transformé comme bien entendu en procès régulier parce qu’il fallait que quelqu’un comme Jésus soit condamné avec un procès, mais c’est un lynchage.

La mort d’Étienne demeure stylisée comme répétition de la passion de Jésus avec les deux paroles « pardonne-leur parce qu’ils ne savent ce qu’ils font », et « entre tes mains, je remets mon esprit ». Ainsi on découvre que pour l’auteur des Actes des apôtres le martyr d’Étienne apparaît pour une répétition de la passion. Ce qui de manière reconstructible et après-coup fait apparaître la passion de Jésus comme

le premier martyr. Nous possédons le premier martyr celui de Jésus et celui d’Étienne le premier martyr des chrétiens, mais le second avec Jésus. Donc on voit toute une réflexion sur la condition des chrétiens qui se rattache à la figure d’Étienne, parce qu’elle demeure en fait développée par la théologie lucanienne, sur la base d’une légende. Celle-ci ne figure pas nécessairement inventée, mais construite sur une tradition locale qui aura compté peut-être dans la communauté helléniste de Jérusalem « Étienne lui aussi a vu le Seigneur ». L’auteur des Actes qui apparaît expert dans l’art de suggérer que les événements visent tout le monde chrétien nous dit qu’au terme de cette lapidation d’Étienne, l’on vit une grande persécution contre l’Église qui se trouve à Jérusalem. Il ajoute même que tous furent dispersés dans les villages de Judée et de Samarie, mais il souligne et cela est important « sauf les apôtres ». C’est quand même extraordinaire, car en fait on estime que ce sont les chefs qui devraient être les premiers à partir et bien non les apôtres ne sont pas concernés. Lorsque Luc dit que suite à la mort d’Étienne tous les adeptes de la voie se trouvent expulsés de Jérusalem sauf les apôtres, on voit bien là encore comment cela répond à l’image que Luc veut donner de la naissance du christianisme. Les apôtres constituent ce lien permanent et assurent cette pérennité de la présence du témoignage de Jésus à Jérusalem. Pour Luc les apôtres restent indissociables de la genèse du christianisme et de l’Église, sans eux pas de chrétiens pas de communautés chrétiennes. On peut imaginer raisonnablement qu’en fait ce sont les judéo-chrétiens attachés à la Torah et attachés au temple qui restent à Jérusalem avec les apôtres parce qu’il n’y avait strictement aucune raison de les inquiéter. Par contre, les trublions hellénistes eux sont évacués.

Est-ce que l’on peut aller plus loin ?

Peut-on penser que les judéo-chrétiens que je définirais comme des gens conservateurs ; attachés au marqueur identitaire de la foi juive, ne se trouvaient pas mécontents de voir disparaître de Jérusalem ceux qui compliquaient et troublaient leurs relations avec le judaïsme ? Honnêtement, je crois que l’on peut le penser. En tout cas ce que l’on sait c’est que par la suite c’est-à-dire dans le champ de la mission paulinienne, de plus en plus la synagogue a marqué sa distance avec le groupe chrétien. Elle ne voulait pas que les chrétiens soient assimilés aux Juifs et notamment au statut d’exception dont bénéficiaient les Juifs dans l’Empire romain. L’on peut imaginer qu’apparut alors des phénomènes de dénonciations, de la synagogue désirant jouir de cet arrangement ce statut qui lui permettait d’entretenir quand même officiellement des relations paisibles avec l’appareil politique de l’empire. On peut dès lors penser qu’effectivement le départ des hellénistes a pu apaiser une situation dont le trouble déplaisait aux judéo-chrétiens et donc aux apôtres et à la famille de Jésus attaché à la Torah.

De toute évidence, une persécution contre l’Église de Jérusalem ne pouvait être déclenchée que par la caste sacerdotale et les pharisiens, c’est-à-dire par l’élément judaïque. On se trouve en présence d’une persécution antichrétienne déclenchée par les juifs de Jérusalem à l’égard de la seule communauté helléniste primitive qui dut subir cette première grande persécution.

Ch 8 v1 : « et tous, excepté les apôtres, se dispersèrent dans les contrées de la Judée et de la Samarie. »

À ce moment-là, les anciens partisans d’Étienne, pris de peur devant l’exécution de leur leader qui figurait être un bon orateur, on fuit à Antioche d’après les Actes. Ce serait eux qui seraient les premiers à avoir évangélisé les païens. Alors on nous présente là-dedans un nom qui est celui de Philippe, qui évangélise les samaritains. À partir de là ils vont pratiquer une mission qui n’apparaîtra plus centripète, mais centrifuge puisque amené à quitter Jérusalem ils vont annoncer le message ailleurs. Dès l’or, on assiste à un changement dans le déroulement des événements. Ce changement va se trouver d’autant plus net que ces gens souvent étaient des prosélytes, c’est-à-dire des gens qui étaient devenus juifs. Ils s’adressaient dans bien des cas à des païens, et cette communauté helléniste va se retrouver avec une mission qui va s’étendre et qui va dépasser le seul cadre du judaïsme. Chassé de Jérusalem les hellénistes ont fui vers des régions où le judaïsme n’était pas pratiqué ou mal et qui échappent si je peux dire aux influences du temple. Ils ont accompli ce que l’on peut appeler œuvre de missionnaire. C’est comme si l’on ouvrait une tumeur et que les métastases prolifèrent c’est une bonne comparaison.

Ce sont les hellénistes qui souhaitent porter l’Évangile aux païens, ce sont les hellénistes qui veulent abolir le temple et la loi. Sur ces trois points, l’affrontement demeure inévitable entre la communauté des hellénistes, et celle de Jacques frère de Jésus et, disons des traditionalistes, à savoir des apôtres liés à la tradition juive. Si nous ignorons cette fracture terrible, quant à ses conséquences dévastatrices, nous ne saurions pas comprendre les épîtres de Paul et le récit non moins harmonisant de Luc dans les Actes des apôtres. Les hellénistes non seulement ne se virent jamais réintégré, mais aussi du fait de leur esprit de révolte, ils ont même fini par se radicaliser toujours davantage contre Jérusalem et contre le judaïsme. Après les années 49 c’est-à-dire après le concile de Jérusalem les deux chemins se trouvent définitivement séparés et ils ne se croiseront plus.

Selon les Actes des apôtres, un nouveau personnage apparaît au moment de la mort d’Étienne, il se nomme Paul ou Saül. Il s’agit d’un hommes encore jeune-homme qui approuve ce meurtre et qui poursuit alors les partisans hellénistes de Jésus.

 

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