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Jésus et les marchands du Temple.

Jésus et les marchands du Temple.

Marchands du temple

Matthieu ch 21, V 12 &13 :

12 Puis Jésus entra dans le temple et chassa tous ceux qui vendaient et achetaient dans le temple ; il renversa les tables des changeurs et les sièges des marchands de colombes. 13 Et il leur dit : « Il est écrit : Ma maison sera appelée maison de prière ; mais vous, vous en faites une caverne de bandits ! »

Pour les juifs, le temple de Jérusalem était le seul temple du Seigneur. Dans chaque localité ils avaient des synagogues pour se réunir, pour lire la Bible et chanter les psaumes mais ce n’était que dans le temple que les prêtres offraient des sacrifices et célébraient le culte. Un bâtiment plus petit se trouvait au milieu du temple et seuls les prêtres y avaient accès pour offrir l’encens. La foule restait dans les cours et c’est là que se trouvaient les vendeurs qui fournissaient les animaux et les oiseaux pour les offrandes. Il y avait également des changeurs de monnaie.

Cette péricope des marchands du temple que Jésus chasse violemment à coups de fouet tout en renversant les étales, à fait l'objet de moult commentaires, et tous attributs plus ou moins un sens moral préventif. Le temple n'est pas un lieu de commerce etc.. Penser qu'il puisse y avoir ici un midrash, peut sembler improbable, voire incongru. Tout au plus, peut-on relier comme l'accomplissement d'une prophétie de  prophète Zacharie.

Za ch 14 V 20 & 21 :

20 En ce jour-là, les clochettes des chevaux porteront l’inscription : « Consacré au SEIGNEUR » ; les marmites, dans la Maison du SEIGNEUR, seront comme des coupes à aspersion devant l’autel. 21 Toute marmite à Jérusalem et en Juda sera consacrée au SEIGNEUR de l’univers. Tous ceux qui viendront présenter un sacrifice s’en serviront pour cuire leur offrande. Il n’y aura plus de marchand dans la Maison du SEIGNEUR de l’univers, en ce jour-là.

Au demeurant, le mot kenaani, (Canaanéen) lorsqu’il est employé dans le Tanakh en dehors de toute référence cananéenne, signifie « marchand », sans que ce mot ne comporte la moindre connotation péjorative.

Il est écrit, par exemple, dans le chapitre des Proverbes qui fait l’éloge de la « femme vaillante » (ècheth ‘hayil) : « Elle confectionne des tissus, qu’elle vend, et des ceintures, qu’elle cède au “marchand” (kenaani) (Proverbes 31, 24)

Le « Cananéen » dont Juda a épousé la fille (Genèse 38, 2) était, comme l’explique Rachi, un marchand (Berèchith rabba 85, 4 ; Proverbes 31, 24).

On retrouve dans le traité talmudique pessaHim un passage midrashique dans lequel le terme « kenaani » est assimilé à un marchand. Ou peut donc ici voir un accomplissement d'un passage de Josué, puisqu’en principe, c'est Josué qui chasse le « Kenaanis. »

Dans la péricope de l'appel de Matthieu-Lévi :

Marc 2, 13-17

« Jésus sortit de nouveau sur le rivage du lac; toute la foule venait à lui, et il les instruisait.  En passant, il aperçut Lévi, fils d'Alpha, assis à son bureau de publicain. Il lui dit: «Suis-moi.» L'homme se leva et le suivit. »

Le père de Lévi (Matthieu) se nomme selon Marc Alphée en grec Ἀλφαῖος (Alphaios). La racine de Alphée en hébreu est חלף qui signifie changer, convertir la monnaie, intervertir, renverser, transporter.

Parmi les marchands du temple, il y  avait des marchands de bestiaux, et sans doute quelques idolâtres. Par jeu de mots entre ונים yonim "colombes"  et , יוונים Yevanim "les Grecs". Mais il y a aussi les changeurs et Jésus les chasse. Il chasse donc Lévi-Halphai du temple. En fait il intervertit en remplaçant les Lévites par d'autres. On retrouve au travers ce midrash l'éternelle prédication "un jour les prosélytes seront dedans et les Lévites seront dehors, les nations païennes viendront remplacer les juifs.

Isaïe 56, 7d : « Car ma maison sera appelée une maison de prière pour tous les peuples. » et il traite justement des étrangers qui se sont לָוָה lavah "attachés, rejoindre ou se connecter" se réfère à la jonction d'un élément ou d'une personne à quelqu'un ou à quelque chose d'autre (racine primaire לוה la même racine que Lévi) à Dieu "repaire de brigands " fait écho à jr 7, 11 « Ce temple qui m'appartient, le prenez-vous pour une caverne de brigands ? C'est pourtant bien ce que je vois, déclare le Seigneur. »

Repaire de brigands, c'est en hébreu biblique :

הַמְעָרַת פָּרִצִים

me'arah phéritzim ou me'arah est une caverne ou une grotte et phéritzim les faiseurs de brèches, "les brigands" il y a jeu de mots sur l'idée de vol, d'effraction et d'abandon de la Loi. Les שבע מצוות להרבנים Sheva miztvot leharabbanim sont sept prescriptions de source non pas biblique, mais rabbinique.

Elles ont été instituées par les Sages de l'ère talmudique, afin de "faire une haie aux paroles de la Torah", c'est-à-dire afin d'établir un garde-fou contre la transgression.(brèche dans la haie de la Loi).

Notons aussi que פָּרִצִים  phéritzim assonne volontairement avec פְּרוּשִׁים pérwšym (Pharisiens). Le mot pérwšym "Pharisiens" vient de l'hébreu p'roushim (singulier paroush, venant de parash signifiant "se séparer", "faire brèche"), qui vient lui-même de la racine du mot araméen oupharsin (« ... et divisé ») écrit sur le mur en Daniel 5:25.

On est dans la métaphore sacerdotale : abandonner la Loi. C'est faire brèche dans le mur du temple. À cet abandon Yahvé mesure pour mesure : les murs de Jérusalem seront détruits.

En Marc, notre passage est entrelacé avec celui du figuier stérile.

Marc : ch 11 V 12 à 21

Le figuier sans figues
12Le lendemain, au moment où ils quittaient Béthanie, Jésus eut faim. 13Il vit de loin un figuier qui avait des feuilles, et il alla voir s'il y trouverait des fruits ; mais quand il fut près de l'arbre, il ne trouva que des feuilles, car ce n'était pas la saison des figues. 14Alors Jésus dit au figuier : « Que personne ne mange plus jamais de tes fruits ! » Et ses disciples l'avaient entendu.
Jésus chasse les marchands du temple
15Ils arrivent à Jérusalem. Jésus entra dans le temple et se mit à chasser ceux qui vendaient et qui achetaient dans le temple ; il renversa les tables des changeurs d'argent et les sièges des marchands de colombes, 16et il ne laissait personne transporter quoi que ce soit à travers le temple. 17Il enseignait et leur disait : « Les Écritures ne disent-elles pas : “Ma maison sera appelée une maison de prière pour tous les peuples” ? Mais vous, vous en avez fait une caverne de brigands ! » 18Les chefs des prêtres et les spécialistes des Écritures apprirent cela et ils cherchaient comment faire mourir Jésus ; en effet, ils avaient peur de lui, parce que toute la foule était impressionnée par son enseignement. 19Le soir venu, Jésus et ses disciples sortirent de la ville.
Le figuier desséché : la foi et la prière
20Le lendemain matin, en passant, ils virent le figuier : il était complètement sec jusqu'aux racines. 21Pierre se rappela ce qui s'était passé et dit à Jésus : « Rabbi, regarde, le figuier que tu as maudit est devenu tout sec. »

Pourquoi ce passage vient-il s'intercaler à cet endroit ?

Le recours à l'hébreu est encore ici obligatoire pour comprendre. Jésus voit un figuier de loin. C'est donc un grand arbre avec des feuilles : On veut donc attirer notre attention sur la grandeur גדול Gadol,  un grand figuier il est le symbole de la Torah, qui donne ses fruits. Il semble figurer le peuple juif, qui se grandit et s'enorgueillit la Torah. Pourtant il ne produit plus de fruits. Il sera desséché, c'est-à-dire sans eau, donc sans Loi, et aussi, en hébreu : rester confondu, rester sec et stérile.

En Luc, l'expulsion des marchands est précédée, nom pas de la malédiction du figuier, mais de la vision de Jérusalem détruite. Luc 19, 41 à 45 :

«41Quand Jésus fut près de la ville et qu'il la vit, il pleura sur elle, 42en disant : « Si seulement tu comprenais toi aussi, en ce jour, comment trouver la paix ! Mais maintenant, cela est resté caché à tes yeux ! 43Car des jours viendront pour toi où tes ennemis t'entoureront d'ouvrages fortifiés, t'assiégeront et te presseront de tous côtés. 44Ils te détruiront complètement, toi et ta population ; ils ne te laisseront pas une seule pierre posée sur une autre, parce que tu n'as pas reconnu le temps où Dieu est venu te secourir ! » 45Jésus entra dans le temple et se mit à en chasser les marchands. »

En Jean, la scénographie de l'épisode est plus complexe Jean 2, 13 à 17 :

« 13La fête juive de la Pâque était proche et Jésus monta donc à Jérusalem. 14Dans le temple, il trouva des gens qui vendaient des bœufs, des moutons et des colombes ; il trouva aussi des changeurs d'argent assis à leurs tables. 15Il fit un fouet avec des cordes et les chassa tous hors du temple, avec leurs moutons et leurs bœufs ; il jeta par terre l'argent des changeurs en renversant leurs tables ; 16et il dit aux vendeurs de colombes : « Enlevez tout cela d'ici ! Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de commerce ! » 17Ses disciples se rappelèrent ces paroles de l'Écriture : « La passion que j'ai pour ta maison me consumera. »

L'expulsion des marchands du temple est une élaboration midrashique qui traite une fois encore de l'interversion eschatologique. Les juifs n'ayant pas été à la hauteur de leur mission, le messie  viendra pour faire entrer à leur place les païens.

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